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Vendredi 26 février 1965
Chers Fils, Membres du Sacré Collège, de la Hiérarchie, des
Instituts Missionnaires, et vous tous qui êtes venus prier avec
Nous ce soir dans cette basilique, soyez les bienvenus! Hier, sur
le tombeau du Prince des Apôtres, au cours d’une émouvante
cérémonie, Nous imposions la barrette aux nouveaux Cardinaux, dont
l’entrée dans le Sacré Collège constitue un éclatant témoignage
de l’universalité de l’Eglise.
Aujourd’hui, cette même pensée de l’universalité de l’Eglise
Nous invite à tourner Nos regards vers les pays de mission, et
c’est sur le tombeau de l’Apôtre Saint Paul, le Docteur des
Nations (1 Tim. 2, 7), que Nous sommes venu faire à Dieu
l’hommage de Notre sollicitude pour les âmes innombrables auxquelles
l’Eglise envoie, depuis des siècles, les meilleurs et les plus
courageux de ses fils.
Cet hommage, Nous avons voulu lui donner une expression concrète et
vivante, en baptisant de Nos mains, en confirmant et en admettant au
banquet eucharistique un groupe de néophytes venus d’une des nations
d’Afrique les plus éprouvées en ces derniers temps.
C’est donc à vous d’abord que Nous Nous adressons, chers Fils,
avec les expressions enthousiastes d’un grand Africain, Saint
Augustin, qui appelait ceux qui venaient de renaître comme vous de
l’eau et de l’Esprit Saint «nouvelle semence de sainteté, enfants
de la grâce, jeune phalange, fleuron de notre honneur, fruit de
notre labeur, ma joie et ma couronne: novella germina sanctitatis,
germen pium, examen novellum, flos nostri honoris et fructus laboris,
gaudium et corona mea» (S. Aug. Sermo 1 in octava Paschae,
157 de Tempore). Quelle source de fierté pour vous d’avoir
été admis à l’honneur d’entrer dans l’Eglise au centre de la
catholicité! C’est à vous que le Pape confie sa sollicitude et ses
espoirs pour le Congo. Il vous dit, comme le Christ au miraculé de
l’Évangile: «Retourne chez toi, et raconte tout ce que Dieu a
fait pour toi» (Luc. 8, 39). Retournez dans votre Patrie, y
répandre la «bonne odeur du Christ» (2 Cor. 2, 15) parmi
vos frères. Dites-leur ce que vos yeux ont vu à Rome.
Dites-leur surtout combien l’immense continent africain est présent
à l’esprit et au coeur du Pape, et combien d’espoirs Il place dans
tant de jeunes et ferventes chrétientés.
Le geste que Nous allons accomplir veut être comme une reconnaissance
symbolique des admirables moissons que l’Eglise a fait mûrir dans les
territoires de mission, et qui ont resplendi d’un éclat singulier
lors de la récente Canonisation des Martyrs de l’Uganda. Vous ne
serez pas étonnés que. Nous ayons voulu vous y associer, chers
Fils et chères Filles des Congrégations missionnaires, afin de
mieux attester la gratitude que l’Église professe hautement envers
ceux et celles qui, partout dans le monde, aujourd’hui comme hier,
sont les précieux et irremplaçables artisans de la tâche ardue et
sublime à laquelle vous avez consacré votre vie. Mais une raison
spéciale Nous a poussé à vous demander d’unir en ce jour votre
prière à la Nôtre. Les derniers mois ont enregistré, dans
plusieurs des territoires dont Nous parlions, bien des événements
douloureux. L’occasion ne Nous a pas manqué de les déplorer
publiquement; mais Nous avons estimé nécessaire qu’une ample et
solennelle cérémonie religieuse rendît manifestes aux yeux de tous le
deuil et la prière de l’Eglise.
Nous sommes donc venu aujourd’hui parmi vous avant tout afin d’offrir
le saint sacrifice pour tous ceux qui ont été victimes de la violence
en diverses régions, et particulièrement au Congo, au cours des
mois écoulés. Car la violence s’est déchaînée, hélas! et le
sang a coulé. Sang de très nombreux fils de la terre africaine,
massacrés au cours de luttes fratricides, souvent en violation des
lois les plus élémentaires de l’humanité; sang aussi d’hommes et
de femmes originaires d’autres pays, catholiques et non catholiques,
et parmi eux bon nombre de pacifiques missionnaires, venus sur le
continent africain pour y apporter, avec l’Evangile du Christ,
l’amour fraternel et la véritable paix. Les uns ont été
brutalement expulsés des territoires où ils exerçaient leur
ministère au service des âmes. D’autres ont été arrêtés,
incarcérés et pris comme otages contre tout droit humain. Devenus
l’objet de la haine la plus injustifiable et d’une cruauté qu’on
voulait croire à jamais bannie des annales de l’humanité après les
horreurs de la dernière guerre mondiale, ces hommes et ces femmes, et
parmi eux un évêque, l’Evêque de Wamba, ont été outragés,
torturés et finalement massacrés de la façon la plus inhumaine.
La fonction de représentant du Prince de la Paix (cfr. Is. 9,
6), que Nous exerçons malgré Notre indignité, Nous fait un
devoir, vous le comprenez, de stigmatiser de tels crimes et de les
porter devant la conscience du monde. Car c’est la conscience du
monde, et non seulement l’Église Catholique, comme chacun le voit,
qui est blessée par ces atteintes aux règles les plus élémentaires
de l’humanité.
Il ne s’agit plus seulement, en effet, du cas de religieux ou de
religieuses persécutés pour leur foi. Il s’agit d’otages qui sont
tués, de prisonniers qui sont passés par les armes sans jugement; il
s’agit d’une brutale violation du droit à la vie, qui Nous oblige
à rappeler solennellement le grand précepte gravé au coeur de tout
homme et inscrit aux premières pages de la Bible: Tu ne tueras pas.
N’est-il pas douloureux de constater qu’en une période de
l’histoire où l’ensemble du genre humain est plus sensible que jamais
aux droits de l’homme, en un temps où ces droits ont été proclamés
par les plus hautes autorités et codifiés dans une charte d’une
portée universelle, le plus fondamental, le plus élémentaire de ces
droits, le droit à la vie, soit ainsi publiquement ignoré,
méprisé, foulé aux pieds?
N’est-il pas humiliant pour notre génération qu’il faille rappeler
que le meurtre direct d’un innocent est un crime, un crime qui offense
Dieu, qui offense le prochain, qui offense la société?
Déjà le droit romain avait stigmatisé comme injustes les
représailles exercées en temps de guerre contre des citoyens privés.
Quoi de plus injuste, en effet, et de plus déraisonnable que la
prise unilatérale d’otages, qui punit sur de tierces personnes,
innocentes et étrangères au conflit, des délits imputés à l’une
des parties en cause? Les Pouvoirs publics eux-mêmes le
reconnaissent, puisqu’une Convention internationale prohibe de façon
générale la prise d’otages en tous lieux et en tous temps. Mais
quoi qu’il en soit de l’observance de cette règle, que la personne
de l’otage, au moins, soit pour tous sacrée et inviolable! Par
quelle aberration pourrait-on tenter d’en justifier le meurtre? Et
le prisonnier? N’est-il pas - comme le blessé - hors de combat et
dès lors protégé par les lois communes du droit des gens?
Faudra-t-il donc dire que les fils d’un peuple jeune et plein de
promesses, arrivé au seuil de l’indépendance, ont marqué
l’entrée de leur Pays dans la vie internationale par le sang
injustement versé?
Nous savons que ces déplorables excès ne sont le fait que d’une
minorité d’hommes et de jeunes gens, exaspérés peut-être par
certaines situations politiques et sociales. Nous voudrions Nous
adresser à ces hommes, leur dire avec toute la conviction que Nous
inspire Notre amour pour eux: ne souillez pas vos mains par des crimes
qui resteront dans les siècles futurs comme une tache sur l’histoire
de l’Afrique! Montrez, au contraire, que cette indépendance dont
vous êtes justement fiers, vous étiez dignes d’y accéder, capables
d’en porter le poids et l’honneur, dans le respect des droits sacrés
de la personne humaine et des lois de la vie en société. Car Nous
avons confiance dans la bonté foncière de votre peuple, lorsqu’il ne
se laisse pas entraîner par de mauvais bergers, confiance dans sa
vocation chrétienne, attestée par tant de réponses généreuses à
l’appel du Seigneur: Nous pensons à vos prêtres, à vos religieux
et religieuses, à vos si zélés catéchistes, qui donnent le
meilleur d’eux-mêmes à l’évangélisation de leurs frères. Ne
sont-il pas tous la vivante illustration des vertus de leur race,
l’exemple des hauteurs auxquelles elles peuvent atteindre au service
d’un grand et bel idéal?
Et c’est pourquoi Nous voulons croire que Notre supplication ne sera
pas vaine, et que les énergies qui s’égarent aujourd’hui dans une
folie de meurtre et de destruction sauront s’employer bientôt à
nouveau dans des tâches constructives.
O Congo! Écoute Notre voix, car c’est la voix d’un père, qui
n’a sur les lèvres que des paroles de pardon et de paix, la voix
d’un ami, que n’inspire aucun intérêt personnel, aucune visée
d’ordre temporel, et qui n’a en vue que le véritable bien de chaque
nation et de toute la grande famille humaine.
A tous Nos fils d’Afrique, qui ont noblement, au fond de leurs
coeurs ou publiquement, désapprouvé et condamné les excès que Nous
venons de déplorer, Nous voudrions adresser un appel à réfléchir
sur la grave leçon qui se dégage de ces tragiques événements. Le
sang appelle le sang. Un désordre engendre un autre désordre. Il
n’est qu’une voie qui conduise à la paix et à la prospérité,
c’est celle du respect de la loi naturelle, du droit d’autrui, et
avant tout du droit à la vie.
Et quant à vous, chers Missionnaires qui Nous écoutez, que
l’exemple de vos frères et de vos soeurs, bien loin de vous assombrir
et de vous décourager, soit pour vous le stimulant le plus exaltant.
Ils ont été jugés «dignes de souffrir pour le nom de Jésus»
(Act. 5, 41), et nous pouvons légitimement nourrir la
confiance qu’ils sont désormais constitués au Ciel les intercesseurs
de vos familles religieuses et les protecteurs de ces champs
d’apostolat qu’ils ont baignés de leurs sueurs et de leur sang.
C’est donc à leur intercession que Nous vous confions en terminant,
à celle de Marie, Mère de l’Église, à celle de Saint Paul,
l’incomparable modèle des Missionnaires de tous les temps. Qu’ils
gardent et protègent vos personnes, et qu’ils ramènent bientôt à
leurs pacifiques travaux ceux d’entre vos frères que la violence de
l’ouragan en a pour un temps écartés. Tels sont Nos voeux, telles
sont les intentions que Nous confions ce soir à votre prière. Nous
vous demandons de l’étendre, cette prière, afin qu’elle soit
vraiment catholique, aux dimensions du monde: qu’elle aille dans
toutes les terres de Mission, partout où l’on souffre, où l’on
aspire à la paix, à la justice, à la liberté.
Et à vous tous qui êtes ici présents, Éminentissimes Cardinaux,
Évêques, Prêtres, Religieux et Religieuses, représentants du
laïcat à vous tous, chers Fils de Rome et du monde, qui, de près
ou de loin, vous êtes associés à cette cérémonie propitiatoire,
Nous accordons de grand coeur, en gage des grâces que Nous invoquons
sur tous et chacun d’entre vous, une très paternelle Bénédiction
Apostolique.
Terminata la Messa, si svolge una commovente manifestazione. Il
Santo Padre, al canto della Salve Regina, si reca dinanzi
all’altare papale di fronte alla grande navata, preceduto dai neofiti
nelle loro candide vesti, a presentarli alla «plebs sancta Dei»
della quale sono entrati a far parte.
Cari fedeli della Chiesa di Roma, abbiamo portato davanti a voi
questi nuovi figli della Chiesa perché anche voi li conosciate, li
abbracciate con la vostra carità e anche perché possiate meglio
comprendere quel che il Signore compie ogni giorno nell’umanità
mediante il ministero della Chiesa. Questi giovani e queste figliuole
che ho ai miei lati, sono diventati fïgli di Dio, membri del Corpo
mistico di Cristo, cittadini della Chiesa e vostri fratelli.
Salutateli, vogliate loro bene e fate che essi sentano, nel vostro
plauso, la comunione di spirito che si è stabilita fra loro e voi.
Comprendano, inoltre, quanto è vasto il regno della carità e come
tocca a noi, umili ministri ed umili figli del Regno di Dio,
lavorare perché esso si stabilisca, si estenda, trionfi in mezzo alla
umanità intera.
Gesù ha voluto che fosse affidata a Noi la sorte del suo Regno in
questa terra. Dobbiamo realmente e con ogni impegno metterci a
disposizione di questo pensiero del Signore e di essere tutti fedeli
alla nostra Religione, nel ringraziare Dio del grande beneficio che
ci ha largito, e nell’essere convinti che ciascuno di noi deve fare
qualche cosa per comunicare agli altri il dono celeste. Ciascuno di
noi deve essere missionario, ciascuno di noi deve avere il cuore grande
quanto il mondo. Ed ora che vedete in questi nuovi nostri fratelli un
segno visibile, poiché sono i rappresentanti di questo disegno divino
sull’umanità, confermate i propositi di buona, fedele, esemplare
vita cristiana; e consegnate a questi neo-cristiani, che ritorneranno
alla loro terra, il messaggio di Roma, che vuol essere messaggio di
fedeltà forte, serena, fraterna, saldissima a Nostro Signor Gesù
Cristo.
Daremo a vostro nome, figliuoli, una piccola croce da appendere al
collo di ciascuno di questi neofiti. Così il ricordo di averla
ricevuta dalle Nostre mani, e quasi dal vostro cuore, renderà loro
più caro questo simbolo e soprattutto confermerà, nei loro cuori,
propositi e sentimenti, che certamente in questo momento hanno
formulato.
Daremo loro, inoltre, la corona del Rosario, perché possano sempre
conservare sentita e profonda devozione alla Madre della Chiesa, alla
Madonna; al patrocinio della quale li affidiamo.
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